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Remembrances #20

Te souviens-tu du jour où tu m’avais dit J’aime être ta salope, pouvoir éprouver avec toi cette liberté que je n’ai jamais vécue avant toi.

Nous avions en commun ce goût des mots. Même les plus osés, même les plus crus. Même ceux qui, avant de te connaître, seraient restés coincés au fond de mon gosier. Entre nous, ils coulaient d’évidence, comme autant d’offrandes à cette franchise absolue qui nous enveloppait désormais. Tout ce qui dans nos vies antérieures avait pu être source de malentendus, de honte ou de carcan était remisé au fond des oubliettes d’un passé expiré. Rien n’était dégradant. Tout devenait possible. Parfois nous nous arrêtions au milieu d’une phrase, encore étonnés et riant de nos audaces. Stupéfaits, nous laissions s’écouler un blanc chargé de délices. Et nos échanges reprenaient de plus belle.

Le mieux, c’était lorsque ces mots accompagnaient nos actes, comme pour en souligner l’indécence et les orner de nos plus beaux bijoux dépravés. Quand tous les filtres sautaient et que nos mots sentaient le sexe cru, l’envie obscène, le désir sale. Chaque parole résonnait alors comme un appel au vice, à l’offrande salvatrice toute en aisance impudique.

Tu aimais mon regard posé sur le plaisir qui t’envahissait. Tout comme je m’étourdissais de t’exhiber le mien. Nous perdions pied dans cet échange insensé qui nous emmenait au-delà de ce que nous avions pu connaître auparavant. Et lorsqu’enfin les sucs de nos jouissances nous recouvraient le ventre, en fermant les yeux, tu me disais alors avec toi je suis moi.

J’ignore bien sûr si tu te rappelles de tout cela. Mais moi oui, je m’en souviens encore.

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